Endoscopy 2016; 48 - A000583fr
DOI: 10.1055/s-0036-1571453

Analyse médico-économique prospective de la pratique de la dissection sous-muqueuse en CHU: la création d'un acte CCAM spécifique est indispensable!

E Pauliat 1, R Legros 1, S Brischoux 1, D Sautereau 1, A Tailleur 1, V Richard 1, L Merle 1, S Chatton 1, P Carrier 1, V Loustaud-Ratti 1, J Jacques 1
  • 1Limoges

Résumé:

Introduction:

La dissection sous-muqueuse endoscopique (DSE) est une technique innovante permettant la résection en un seul bloc d'importantes lésions tumorales superficielles du tractus digestif. L'évaluation de son efficacité et de sa sécurité est retrouvée dans la littérature mais aucune étude n'évalue le coût de cet acte nécessitant des dispositifs médicaux stériles (DMS) coûteux. Cette intervention, bien plus longue que les actes d'endoscopie classique, ne possède pas de cotation spécifique dans la classification commune des actes médicaux (CCAM). Le séjour du patient ne peut donc pas être orienté vers un groupe homogène de malades (GHM) spécifique permettant de couvrir les coûts liés à cette procédure.

L'objectif de l'étude était d* évaluer le coût réel d'un séjour pour dissection sous muqueuse (incluant le montant des DMS et les coûts du séjour hospitalier) et le comparer aux tarifs de remboursement des groupes homogènes de séjours (GHS).

Patients et Méthodes:

Etude prospective monocentrique ayant inclus de façon consécutive tous les patients ayant bénéficié d'une DSE entre janvier 2015 et septembre 2015. Nous avons calculé le coût total net des séjours patients, incluant le montant des dispositifs médicaux utilisés lors des DSE et les coûts d'un séjour hospitalier. Le coût moyen d'une journée d'hospitalisation pour dissection sous-muqueuse a été extrapolé à partir des données de l'étude nationale des coûts (ENC) 2013 de 10 patients hospitalisés pour cet acte et pour lesquelles les coûts réels en DMS de dissection sous-muqueuse était disponible et permettait un réajustement. La recette perçue par l'hôpital a été obtenue via les Groupes Homogènes de Séjour (GHS). Le différentiel entre le coût total et la recette perçue constitue au final l'analyse médico-économique.

Résultats:

26 patients avec des lésions précancéreuses ou cancéreuses superficielles ont été inclus dans l'étude: 17 (65,3%) pour une lésion rectale, 4 (15,3%) pour une lésion oesophagienne et 5 (19,4%) pour une lésion gastrique. 16 (61,5%) étaient des hommes et 10 (38,4%) des femmes. L'âge moyen était de 66,8 (+/- 9,3 SD) ans. La durée moyenne de procédure était de 160,5 (+/- 61 SD) minutes. 100% des lésions ont étaient réséquées de façon monobloc, 88,4% (23) étaient réséquées R0 et 84,6% (22) de façon curative. 2 (7,6%) perforations ont été déplorées et traitées par voie endoscopique. Aucun patient n'avait de lésion résiduel lors de son contrôle à 3 mois.

Les séjours étaient répartis dans 8 GHM avec une durée moyenne de 3,4 jours (+/- 1.25 SD). Le coût de la journée d'hospitalisation pour DSE a été évalué à 568 euros. La moyenne des dépenses en DMS (couteaux de dissection, soluté de glycerol, pince coagulante, clips ...) par intervention était de 1008,84 euros (+/-: 381,45). Tous GHM confondus, la moyenne des coûts des séjours était de 2976 euros (+/-: 900) et la moyenne des recettes par séjour de 2729 euros (+/-: 1224,5).

Pour l'ensemble des 26 interventions la recette globale de l'hôpital était de 70935,50 euros pour une dépense totale estimée qui s'élevait à 77359 euros (dont 26230 euros de DMS). L'hôpital présente donc un déficit de 6423 euros. Les DMS correspondaient à plus de 40% de la dépense totale de l'hôpital. Les valorisations les plus importantes concernaient les GHM avec des niveaux de sévérité élevés. Pour les GHM de niveau de sévérité 1 (sans complications ou comorbidités associées) l'hôpital présentait toujours une balance coût/recette négative.

En moyenne quelque soit le niveau de sévérité du malade, l'hôpital devenait déficitaire pour les hospitalisations pour DSE à partir du 4ème jour d'hospitalisation.

Conclusion:

Le coût moyen en DM représente 37% de la recette perçue par l'hôpital. Pour cette cohorte de patients, les sommes engagées par l'hôpital ne sont pas couvertes par les recettes perçues. Cependant il existe une grande disparité entre les tarifs des GHM codant les séjours pour DSE. On remarque ainsi que selon le GHM attribué au séjour, la recette perçue permet parfois de couvrir la totalité des dépenses. La création d'un acte spécifique dans la CCAM est indispensable pour assurer le remboursement totale de la somme engagée par l'établissement pour cette procédure fortement avantageuse pour le patient au regard de la morbi-mortalité des alternatives chirurgicales.