Endoscopies digestives basses (ECB) en réanimation: Quelle indication et pour quel bénéfice? une étude observationnelle rétrospective bicentrique

Introduction:

L'endoscopie digestive basse (EDB) est indispensable dans l'investigation de certaines pathologies digestives basses, mais son bénéfice reste discuté chez les patients de réanimation, en raison de la complexité de la préparation colique. La rentabilité des coloscopies a été très peu étudiée dans ce contexte, c'est pourquoi nous avons voulu étudier les indications et la rentabilité diagnostique des EDB réalisées dans ces conditions.

Patients et Méthodes:

Dans cette étude observationnelle rétrospective bicentrique (2004 – 2015), l'objectif principal était d'évaluer la rentabilité diagnostique des EDB réalisées chez des patients de réanimation. Leur rentabilité était définie a priori comme élevée si elle entrainait une modification des thérapeutiques en cours; une intervention endoscopique; ou participait à la décision de limitation des thérapeutiques. Les objectifs secondaires étaient: la description de la qualité des EDB en réanimation, et de leur préparation; leur place dans la stratégie diagnostique; la description de leur éventuelle morbidité.

Résultats:

Cent onze EDB ont été réalisées en réanimation chez 84 patients (hommes n = 50; 60%, âge 72 ans [63 – 84]; SAPS II 73 [62 – 84]) dans les 3 jours [1 – 10] après l'admission. Une hémorragie digestive ou un choc hémorragique était la raison de l'admission en réanimation chez 35 patients (42%). Le jour de l'EDB, 37 patients (44%) étaient en état de choc. L'indication de la réalisation de l'EDB en réanimation étaient: une hémorragie (n = 77) avec 35% d'anémie aigue (n = 39); la suspicion d'une colite (ischémique [n = 19, 17%], infectieuse [n = 17, 15%], toxique [n = 5, 5%], inflammatoire [n = 1, 1%]); le bilan d'une bactériémie à bacille Gram négatif (n = 7, 6%); un volvulus du sigmoïde (n = 4, 4%); et le diagnostic de néoplasie (n = 4, 4%). La rentabilité des coloscopies en réanimation était estimée élevée dans 50% des cas (n = 56), avec une intervention endoscopique réalisée dans 32% (n = 35). Elles ont mené à l'adaptation d'une antibiothérapie (n = 9), une intervention chirurgicale en urgence (n = 10), ou à une limitation des thérapeutiques (n = 2).

Dans 23 cas (21%), la coloscopie était normale.

La préparation des patients était de bonne qualité dans 27% des cas (n = 30); et la coloscopie était complète chez 33 patients (30%). La coloscopie était le plus souvent réalisée en 2ieme (58%) ou 3ième (40%) position après la réalisation d'un scanner abdominal ou d'une endoscopie digestive haute (respectivement réalisés en 1ière position dans 69% et 55%). Trois EDB de réanimation ont été compliquées, par 3 défaillances hémodynamiques et 2 défaillances respiratoires, mais aucune d'entre elle n'a entrainé de décès.

Discussion:

Dans notre série de patients de réanimation non sélectionnés, les coloscopies étaient principalement réalisées pour rechercher un saignement digestif bas. Malgré un taux bas de bonne préparation colique, leur rentabilité est élevée dans la majorité des cas.

Conclusion:

Bien que réalisée dans des conditions souvent difficiles, les EDB en réanimation semblent utiles pour le diagnostic et pour la prise en charge thérapeutique des patients graves admis en réanimation, et pas seulement pour les hémorragies digestives basses.